Une description du vol à voile...

Voici un extrait d'un texte publié par Francis Marmande dans LE MONDE du 26/07/06... Ce texte est à propos du planeur de Bourvil dans "La Grande Vadrouille", mais l'extrait ne se rapporte que trés peu au film, mais plutôt à l'expérience personnelle...
"...Or dans le film, on voit un Castel C25S sans haubans. Les deux pilotes s'y tassent côte à côte, ce qui déjà, dans les salles, faisait rire. Il faut dire que les carlingues de planeur de cette époque ont toujours un vague aur de cercueuil fantaisie. Pour l'instant, j'y aurai passé plus d'heures que dans un couffin, fût-il fantaisie.
L'été 1965, là-haut, sur le terrain, nous étions fous. Fous d'avions, fous de fuselages, fous d'empennages papillon, fous des nuages qui se font et défont, fous du vent qui rend fou, fous d'une prise de terrain réussie, comme d'autres sont fous de folie. Le terrain, juché tel un porte-avions échoué en montagne, herbu et caillouteux, envahi de moutons carillonant la nuit, siégeait dans un nid de nuages et de sommets aux noms chantants. Plus prés, le vent, plus loin, l'océan. On sortait titubant, radical, anticolonialiste à jamais, de la guerre d'Algérie. La plupart d'entre nous n'avaient pas l'âge du permis de conduire. Mais on volait.
Des planneurs, ces avions sans moteurs aux ailes de géant, tout nous plaisait. Tout. Pour quelles raisons ? Trop : Freud, phallus, fuselage, frayeurs, free, frivole, fantaisie. Princes de la glisse et du paradoxe. Voler sans explosion dans l'invisible. Se faire à l'invisible, repérer l'ascendance à des riens, éviter le danger mais pas la peur, suivre d'imaginaires couloirs, grimper dans l'onde, sans jamais rien voir de ses yeux.
Les planeurs combinaient tous les mérites : sublimes à regarder, même les plus moches ; scultures volantes, résultante ailée de tous les arts pratiques, si sonores (le zef s'y engouffre en sifflant des sornettes) ; génialement inutiles ; n'ayant strictement aucune autre raison que de planer ; et surtout, sans pardon, aussi exigeants qu'un stradivarius ou un Miura. A 5 mètres prés, 10 noeuds en trop ou en moins, quelque infime erreur d'appréciation, c'était la casse ou la mort. Régulièrement, des pilotes de long-courriers passaient leurs congés à se ressourcer, retrouver en planeur la précision, le doigté, l'élégance et la justesse. Nous, nous prenions l'air badin."
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Commentaires 2 commentaires
Seb le 08 Août 2006 à 13:25
ça c'est ce que j'appelle la passion :) Je me souviens vaguement de la scene dans le film, ça sentait le suicide à plein nez ^^
Maxi le 08 Août 2006 à 14:25
Un aviateur poête, quelle originalité ^^