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AF 447

Posté par : n666eo - Le Dimanche 7 Juin 2009 à 11:26

Bonjour à tous,

 

Vous avez, je suppose, tous entendu parler de la disparition d'un A330 d'Air-France dans l'Atlantique Sud il y a quelques jours. J'écris ce petit billet afin de recadrer un peu les choses pour ceux qui lisent ce blog, parce que les délires journalistiques de ces derniers temps commencent à me donner des envies de meurtres...

 

L'hypothèse officielle principale reste donc la traversée de violents orages... Faudra en parler aux vols Ibéria et Lufthansa qui sont passés juste avant l'AF447 et qui n'ont rien signalé d'embêtant côté météo... Un orage ça peut se développper très vite, certes... Mais à ce niveau là, il faut arrêter tous les vols transcontinentaux, selon le principe de précaution si cher à notre gouvernement...

 

Il existe pourtant une hypothèse bien plus plausible : les systèmes permettant de mesurer la vitesse d'un avion dans la masse d'air n'ont pas changé depuis que M. Pitot les a conçus pour les bateaux. Ces systèmes (tubes de Pitot) fonctionnent très bien, mais présentent l'incovénient de reposer sur un tube relativement fin et qui s'obstrue assez facilement. Normalement ils sont vérifiés fréquemment pour éviter qu'un insecte viennent s'y loger, et surtout sont dégivrés pour éviter que la glace ne les bouche.

 

Ca c'est la théorie. Dans la pratique, il s'avère que ces tubes fabriqués par Thalès ont une sensibilité non négligeable au givrage. Un certain nombre d'incidents ont été rapportés chez Air France sur des avions équipés de ce modèle de sonde. Il ont d'ailleurs été changés pour un autre modèle dans beaucoup de compagnies... Mais pas celui des A330/A340 d'Air France, qui sont toujours les tubes Thalès d'origine.

 

Il faut à ce stade ajouter une précision : les avions de lignes, surtout longs courriers, en croisière ont une marge de manoeuvre en vitesse extrêment limitée. C'est ce qu'on appelle de "Coffin Corner". Pour faire simple, la diminution de densité de l'air, couplé à l'augmentation de sa compressibilité aux altitudes de croisières des avions de lignes, fait que la marge entre la vitesse de décrochage et la survitesse devient de plus en plus étroite, au point de ne laisser parfois qu'un peu moins de 50 km/h de marge entre les deux...

 

A partir de ces deux faits, on peut retracer une séquence extrêment plausible : grivrage d'un ou plusieurs tubes Pitot, qui entraîne une différence entre les vitesses mesurées (tous les systèmes d'un avion sont doublés ou triplés, et les valeurs sont comparées entre elles pour vérifier la cohérence), différence qui a pour effet la première série de pannes enoyées automatiquement par l'avion aux opérations : panne du pilote auto (il ne connait plus la vitesse de l'avion), passage des commandes en loi dégradée (idem) et pannes des ADIRUs concernés (ce sont les calculateurs qui récupèrent, entre autre, les données des tubes Pitot).

 

A ce moment là, les pilotes sont en aveugles, de nuit, sans aucune donnée de vitesse valable, et probablement dans les turbulences... Et ils ont une plage de vitesses viables extrêmement faible... L'avion accélère légèrement et dépasse le mach critique, la cellule est endommagée, l'avion envoie dans ces derniers messages aux opérations une dépressurisation... La suite est malheureusement facile à imaginer...

 

Pour remettre les choses à leur place : il ne s'agit ici que d'une hypothèse, avancée par des gens connaissant l'avion (pilotes, mécannos), qui n'a pour seule crédibilité que de regrouper tous les paramètres connus, et d'avoir une probabilité non négligeable. Il ne s'agit absolument pas d'une vérité. Les seules vérités connues à ce jour sont que la météo était bien orageuse, mais assez habituelle dans cette zone. Que l'avion a envoyé des messages ACARS vers les opérations et la maintenance indiquant notamment une panne de l'instrumentation, y compris celle de secours, une panne du pilote auto, et une dégradation des lois de commandes, suivis d'une dépressurisation. C'est tout.

 

Voilà le recadrage que je voulais vous exposer. L'hypothèse de l'orage seule ne veut rien dire pour moi. Si un avion de ligne va au tapis à chaque fois qu'il traverse une situation orageuse "normale", alors il va falloir reprendre le bateau et le train pour voyager... Mais heureusement ça ne semble pas être le cas. Il y a donc forcément autre chose qui a joué cette nuit là. Quoi ? On ne le saura probablement jamais...

 

@+

 

P.S. : pour vous donner une idée de la crédibilité des journalistes, la soit disant dernière photo de l'avion prise soit disant quelques semaines avant, date en réalité de 2006 et est dispo depuis cette date sur le site Airliners.net :

www.airliners.net/photo/Air-France/Airbus-A330-203/1054322/L/

 

 







Commentaires 5 commentaires

Seb le 07 Juin 2009 à 12:53

Mais elle est pas assez sensationnelle ton histoire pour passer à la tv. Les journalistes grand public ne seront jamais capable d'expliquer ça dans le temps impartis, alors ils préfèreront simplifier, vulgariser, et montrer des images choc pour passionner les foules.

La vie au journal tv, c'est comme un résumé de course de Nascar, on garde que le plus trash. Tout ça pour te faire croire qu'entre la crise, la grippe du porc et les nord coréens, le monde est mal barré, mais toi petit français, tu seras épargné parce que tu regarde ça sur TF1 derrière ton écran sur un sofa. Elle est bien ta vie finalement non ?

Tonio le 07 Juin 2009 à 18:29

Merci pour ce recadrage d'idées. En effet, les médias ne cessent de chercher des réponses et d'émettre des hypothèses, pour se démarquer et intéresser les téléspectateurs, ne voulant pas admettre qu'une anomalie si petite puisse entrainer un crash si important.
Bref espérons retrouver la boite noir (qu'on ne retrouvera probablement jamais) pour élucider une partie du mystère.

farwarx le 08 Juin 2009 à 11:19

http://www.lexpress.fr/actualites/2/dix-sept-corps-du-vol-af-447-repeches-dans-l-atlantique_765841.html

Ils parlent des sondes PITOT.
Moins bien et moins précisément que toi ;)

Merci de ton billet, avoir un avis pro dans ce genre d'affaire, ce n'est pas compatible avec les médias grands public.
Au moins on a une hypothèse plus plausible que celles annoncées.

Quand les journaux avaient annoncées que l'avion s'était 'abimé' (on peut dire crasher!) à cause d'éclairs, j'ai tout de suite eut un petit rictus, sachant que les avions sont foudrés régulièrement en vol!
Bref, comme les guignols disent à chaque fois: "Vous pouvez éteindre votre télévision et reprendre une activité normale!" et je rajouterai: "Revenir sur Kookyoo.net ou on a pas peur de dire les vérités!".

Pilot le 09 Juin 2009 à 10:19

Les tubes de Pitot givrés n'expliquent rien

La centrale à inertie elle donne toujours de bonnes indications

Une centrale à inertie ou centrale inertielle est un appareil de navigation de précision comportant des gyroscopes, des capteurs d'accélération et de vitesse angulaire et calculant en temps réel à partir de ces mesures l'évolution du vecteur vitesse et de la position du véhicule à bord duquel il est installé, ainsi que de son attitude (roulis, tangage, cap). Les centrales à inertie sont installées à bord de navires, d'aéronefs, de missiles et de véhicules spatiaux.

Ceci remet en cause l'explication sur les tubes de Pitot qui ne sont pas essentiels en navigation.

n666eo le 22 Juin 2009 à 21:24

Loupé Pilote... Les centrales inertielles sont de supers appareils, c'est vrai. Elles mesures les accélérations dans les 3 dimensions, et à partir de valeurs initiales, peuvent calculer la vitesse dans les 3 dimensions, et donc, toujours par intégration la position dans les 3 dimensions...
Alors où est le hic ? Ben ces vitesses ont pour référentiel le sol. Ce sont donc des vitesses par rapport au sol... De la même manière qu'un GPS donne des vitesses par rapport au sol... Et alors ?
Et alors à plus de 30000ft il y a quasiment un rapport 2 entre la vitesse par rapport à la masse d'air (qui est nettement moins dense) et la vitesse par rapport au sol.
Un avion de ligne ne peut voler à 900km/h, sinon il se désintègre... Les vitesses max sont plus proches des 500km/h. Et pourtant dans les performances pour les compagnie aériennes, la vitesse de croisière d'un avion de ligne est de 900km/h... à 10000 mètres et par rapport au sol !

En gros, il faut majorer la vitesse indiquée de 10% par tranche de 6000ft (c'est un calcul approximatif qui ne tient compte ni de la pression, ni de la température), ce qui à 40000ft représente 67% de majoration... Autant dire que la vitesse indiquée par les centrales inertielles, n'a strictement aucune utilité pour le pilotage...

D'ailleurs, pourquoi dans le cas contraire, aurait-on gardé les sondes Pitot comme donnée primaire de vitesse, alors qu'elles sont assez vulnérables, et qu'il suffirait de faire indiquer la vitesse du GPS ou des centrales inertielles directement sur les écrans ??? Sont cons ces ingénieurs... Quoi que...

Donc je confirme mon hypothèse, qui semble d'ailleurs être celle privilégiée par le B.E.A., même s'ils montrent encore des réserves tant que tous les éléments ne sont pas rassemblés...

Par curiosité Pilot : tu es pilote réel ? Parce que la différence vitesse air/vitesse sol est une des bases du vol réel...



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